On a tout dit sur la Fête des Lumières et ses racines catholiques. Tout ? Pas vraiment. En discutant, on découvre que finalement personne ne sait vraiment d’où viennent ces jours de célébration. Ou plutôt ce jour, le 8 décembre. Et d’autres autour. Oui mais pourquoi ?
Lyon est une ville intéressante et ambigüe à plus d’un titre. Son passé catholique est évident. Tout comme l’idée que la Fête des Lumières est née d’une histoire religieuse. En réalité, la Fête des Lumières telle qu’on la connaît n’a pas grand chose de catholique. C’est même un peu tout le contraire. Et pour complexifier la chose on pourrait même dire qu’il n’y a pas une mais deux Fêtes des Lumières.
Lyon est une fête ?
Oui, deux. C’est ce que l’on appelle jeter un pavé dans la mare. Et pourtant historiquement, c’est vrai, la Fête des Lumières est catholique. La preuve : à Lyon, depuis des siècles, les croyants vénèrent la Vierge Marie qui les aurait sauvés de la Peste il y a de cela plusieurs siècles. En 1852, on franchit un énorme cap dans la ville et on décide ni plus ni moins que d’installer une statue sur l’ancienne chapelle de Fourvière. On a bien dit chapelle. C’était bien avant la Basilique que nous connaissons tous. But de la manoeuvre : rendre hommage à Marie. La date est habilement choisie. Ce sera le jour traditionnel de l’hommage de la ville à son égérie. Soit le 8 septembre.
Hélas, les conditions météorologiques ne permettent pas l’installation. Alors on la reporte. De trois mois. Jusqu’au 8 décembre suivant. Sauf que, pas de bol, là aussi il fait moche. Très moche. Vous allez me dire on pouvait s’en douter, en plein mois de décembre et je vous répondrai que le lyonnais est quelqu’un d’assez optimiste. Un peu trop sans doute. Ce jour là, comme on pouvait s’y attendre, il pleut à nouveau des cordes. C’est un vrai problème vu qu’on avait prévu d’installer la statue une bonne fois pour toutes. Et demandé à l’avance à tout le monde de mettre des bougies à ses fenêtres pour célébrer l’occasion.
Le lyonnais moyen étant ce qu’il est, après trois mois d’attente, il en a ras la papillote. Pluie ou pas pluie, voilà que tout le monde se met à installer ses petites bougies aux fenêtres. La première Fêtes des Lumières est née. Dans un esprit frondeur face aux éléments déchaînés. Une manière d’envoyer un message là-haut pour dire que, hé ho, on essaie d’honorer là donc ça suffit bien maintenant.
Pendant des années, la Fête des Lumières ce sera ça. Des bougies aux fenêtres ou dans les vitrines des boutiques. De la cire et de jolies flammes oscillantes. De nombreux lyonnais âgés s’en souviennent encore non sans émoi et vous diront que c’était quand même autrement mieux avant. Mais avant quoi ?
Lumières divines
Avant la deuxième Fête des Lumières bien sûr ! On vous a pourtant dit au début qu’il y en avait deux. Concentrez-vous un peu. Nous sommes en 1989, le Maire de Lyon s’appelle Michel Noir. Pas forcément un nom prédestiné à la lumière si vous voulez mon avis. Et pourtant. Le brave homme décide de passer un cap et lance l’organisation d’une Fête des Lumières… laïque.
A partir de là, la scission commence. Ou l’union, si vous voulez. Mais deux Fêtes des Lumières vont cohabiter. Celle des bougies nommées lumignons et celles des gigantesques oeuvres artistiques. Un peu partout dans la ville, année après année, des projets sont sélectionnés. Et installés. Du seul 8 décembre on passe à 4 jours de célébrations en son & lumière. La Fête des Lumières devient populaire. Attire les touristes. Fait beaucoup pour le rayonnement de Lyon dans la région et aux alentours.
Le temps passe, la Fête des Lumières devient une énorme machine. Les lumignons sont moins présents sur les rebords des fenêtres. Les vitrines perdent peu à peu leurs lumière du 8 décembre. Certains commencent à parler de charme rompu. De ville qui a perdu ses repères. De grand n’importe quoi. Et pourtant, bon gré mal gré, les croyants continuent d’y croire. Mais forcément, quand des centaines de milliers de gens défilent pour autre chose que les valeurs que l’on porte, ça peut sensiblement irriter.
Main dans la main
Surtout quand les genres se mélangent. Et que les lumignons destinés aux fenêtres des habitations deviennent opération pour aider des associations. Au fond, rien de si surprenant, les deux Fêtes que l’on voit souvent comme une seule se rapprochent. Autour de la notion d’aider son prochain. Et de lui réchauffer le coeur. Les façades des cathédrales ou des églises se laissent même caresser par les puissants projecteurs et envelopper par les mélodies puissantes des haut-parleurs. Pour le plus grand bonheur du public.
D’un moment de croyance, la Fête des Lumières des origines se voit donc accompagnée d’un véritable festival artistique. Deux fêtes pour communier d’une manière ou d’une autre. Pour partir ensemble en procession et surtout vivre de belles émotions. Dans un bel esprit de rencontre, et de partage. Le véritable but des fêtes, finalement.
Fête des Lumières Un peu partout dans Lyon Du 8 au 11 décembre 2022